Le beta-hydroxy-beta-methylbutyrate est un métabolite de la leucine, l’un des trois acides aminés ramifiés (BCAA pour branched amino acids en anglais). La leucine est souvent présentée, et à raison, comme l’acide aminé clé de l’anabolisme, d’où son ratio dans les complexes de BCAA que l’on trouve sur le marché (le plus souvent 2 : 1 : 1, mais l’on trouve également du 4:1:1 voir même du 8:1:1). Cette popularité est due au rôle de la leucine dans le processus anabolique, via l’activation de la voie mTOR (de l’anglais mechanistic target of rapamycin – auparavant mammalian target of rapamycin), une enzyme de la famille des sérine/thréonine kinases qui régule notamment la prolifération cellulaire et la croissance cellulaire. mTOR est impliqué dans les voies de signalisation des facteurs de croissance IGF-1 et IGF-2, qui nous intéressent particulièrement pour la construction musculaire.
le beta-hydroxy-beta-methylbutyrate a été mis sur le marché comme supplément alimentaire au début des années 1990 : il a fait une entrée remarquée sur le marché des suppléments grâces aux nombreuses vertus qu’on lui prêtait alors, mais son prix le rendait souvent prohibitif. Je me rappelle avec nostalgie le premier flacon que j’avais acheté dans une enseigne aujourd’hui disparue. J’avais presque l’impression d’acheter des anabolisants, et le prix me paraissait justifié. Plus d’une décennie plus tard, les prix ont baissé, l’excitation de la nouveauté également. Le HMB est désormais disponible en poudre sur de nombreux sites de suppléments, à des prix tout à fait abordables pour le sportif ordinaire.
Je m’intéresse ici à ce composé car il est l’un de seuls suppléments censés être à la fois anabolique, anticatabolique et … légal (du moins au sein de l’Union européenne, ailleurs la législation est parfois plus permissive), aux cotés de sa parente, la L-Leucine.
Depuis que le HMB a été commercialisé, une myriade d’études a été faite pour en démontrer les vertus, au niveau de l’anabolisme et de la performance en général. Sans jeter le discrédit sur des études menées par des scientifiques ayant l’obligation morale de déclarer tout conflit d’intérêt, on peut dire sans trop de risques que la plupart de ces recherches ont été financées par des groupes qui commercialisent ce composé.
Il faut également souligner que parmi ces nombreuses études, certaines se contredisent concernant l’efficacité du HMB sur la synthèse des protéines, la composition corporelle et la performance.
Pour établir son efficacité, les chercheurs ont pu s’intéresser à l’influence du beta-hydroxy-beta-methylbutyrate sur la tension artérielle, le taux de cholesterol, les cellulaires immunitaires, et bien évidemment aux marqueurs sanguins des dommages musculaires que sont la protéine kinase, le lactate dehydrogenase ou encore la 3-methylhistidine.
Certaines de ces études menées sur des hommes en bonne santé mais non sportifs ont été plus que concluantes, puisque la prise de masse maigre a été mise en évidence avec des doses allant de 1,5 à 3g de HMB[1]. Les charges maximales utilisables par les sujets ont également augmentées significativement suite à une supplémentation prolongée en HMB. D’autres tests on été effectués sur des sujets non entraînés ont été tout aussi concluants, démontrant une baisse des marqueurs sanguins de dommages musculaires[2].
D’autres études menées sur des sujets non entraînés ont été en revanche moins concluantes, même si les marqueurs de dommages musculaires ont là encore été réduits par la prise de HMB, démontrant son action anticatabolique, même si cela ne s’est pas traduit par une augmentation de la masse maigre[3].
La supplémentation en HMB nous intéresse en notre qualité de sportifs pour sa capacité à améliorer nos performances et notre ratio masse maigre/masse grasse. Les études les plus significatives sont donc celles menées sur des sujets entraînés; et ici encore, la supplémentation en HMB s ‘est révélée être efficace pour diminuer les marqueurs sanguins de dommages musculaires, augmenter la masse maigre et même améliorer la VO2 max (le Volume d’Oxygène Maximum est la quantité maximale d’oxygène que le corps consomme lors d’un effort intense par unité de temps). Une méta-analyse regroupant les travaux effectués entre 1967 et 2001 sur des sujets sportifs a clairement mise en évidence la capacité du HMB a augmenter la masse maigre[4].
Enfin, les chercheurs se sont intéressé aux effets du HMB sur les personnes âgées, autre groupe pour lequel la conservation de la masse musculaire est primordiale, puisque les personnes âgées sont susceptibles d’être touchés tôt ou tard par la sarcopénie, pathologie provoquant une perte progressive et élevée de la masse, de la force et de la fonction musculaire au cours du vieillissement. Chez les sujets âgés, le HMB s’est révélé à même de limiter la dégradation musculaire et d’engendrer une réduction du tissu adipeux[5]. De semblables constatations ont été faites concernant la supplémentation en HMB chez des sujets confrontés à un catabolisme musculaire important, notamment des malades du SIDA[6] ou de cancers[7].
Si parmi les études menées sur le HMB, certaines sont en contradictions avec les conclusions ci-dessus, l’on doit bien reconnaître que la majorité des travaux menés sur ce composé concluent à l’efficacité du beta-hydroxy-beta-methylbutyrate comme anticatabolique. On peut alors légitimement se demander pourquoi ce composé est si peu plébiscité. Premier élément de réponse que nous avons évoqué plus haut, son prix initial, souvent jugé excessif par rapport à ses effets. En effet, du fait du battage initial fait autour du HMB, d’aucuns s’attendaient à des effets rapides et impressionnants, qu’il est déraisonnable d’attendre d’un supplément alimentaire. Le HMB n’est pas un stéroïde anabolisant, et ses effets son subtils et s’inscrivent dans la durée. Ensuite, le HMB souffre d’un défaut de notoriété par rapport à ses « concurrents directs », les BCAA et les EAA (Lire ou relire « Acides aminés essentiels (EAA) ou acides aminés ramifiés (BCAA), lesquels choisir? »), qui sont de bonnes options pour accroître la masse maigre et freiner le catabolisme.
Les acides aminés ramifiés et essentiels étant désormais largement disponibles, et à des prix toujours plus attractifs, pourquoi s’encombrer du beta-hydroxy-beta-methylbutyrate, me direz-vous. A mon sens, le principal avantage du HMB par rapport aux autres options anticataboliques, c’est le fait qu’il n’élève pas le taux d’insuline, contrairement à la Leucine. Or l’on sait qu’un taux élevé d’insuline entrave la fonte adipeuse, même si dans la pratique une supplémentation en BCAA ou en EAA peut avoir un impact favorable sur la mobilisation des acides gras et donc sur la perte de gras. En d’autres termes, en période de restriction calorique sévère (sèche), le HMB me semble être une meilleure option dans certaines circonstances, par exemple pendant les séances de cardio, ou sur d’autres créneaux, avant une séance de musculation, pendant, ou après (cela est également valable pour les autres activités sportives si la préservation de la masse musculaire est importante pour vous), ajouter du HMB (entre 1 et 3g par jour, de préférence à répartir en plusieurs prises) à un complexe d’acides aminés (EAA, BCAA, glutamine, voire créatine (Certaines études ont montré une synergie entre HMB et créatine) peut s’avérer particulièrement utile pour favoriser l’anabolisme et améliorer la composition corporelle. Cerise sur le gâteau, le HMB semble également avoir une incidence positive sur la sécrétion d’hormone de croissance et d’IGF-1, une propriété particulièrement intéressante pour les sportifs.
On notera que sont désormais disponibles deux formes de HMB, le HMB « classique » (Bêta-hydroxy bêta-méthylbutyrate Calcium) et le HMB-FA (free acid, présent notamment dans CLEAR MUSCLE de MUSCLETECH), qui serait plus assimilable, et dont les résultats seraient supérieurs, puisqu’une étude de 2014 a mis en évidence un impact considérable sur la force (une augmentation jusqu’à trois fois supérieurs aux résultats obtenus par le groupe ayant pris le placebo). A tester !
[1]Effect of leucine metabolite beta-hydroxy-beta-methylbutyrate on muscle metabolism during resistance-exercise training.Nissen S, Sharp R, Ray M, Rathmacher JA, Rice D, Fuller JC Jr, Connelly AS, Abumrad N J Appl Physiol (1985). 1996 Nov; 81(5):2095-104.
[2]Supplementation with beta-hydroxy-beta-methylbutyrate (HMB) and alpha-ketoisocaproic acid (KIC) reduces signs and symptoms of exercise-induced muscle damage in man. van Someren KA, Edwards AJ, Howatson G Int J Sport Nutr Exerc Metab. 2005 Aug; 15(4):413-24.
[3]Beta-hydroxy-beta-methylbutyrate ingestion, Part I: effects on strength and fat free mass. Gallagher PM, Carrithers JA, Godard MP, Schulze KE, Trappe SW, Med Sci Sports Exerc. 2000 Dec; 32(12):2109-15.
[4]Effect of dietary supplements on lean mass and strength gains with resistance exercise: a meta-analysis. Nissen SL, Sharp RL, J Appl Physiol (1985). 2003 Feb; 94(2):651-9.
[5]Vukovich , Stubbs NB, Bohlken RM, Desch MF, Fuller JC, Rathmacher JA. The effect of dietary β-hydroxy-β-methylbutyrate (HMB) on strength gains and body composition changes in older adults [abstract] FASEB J. 1997;11:A376.
[6]Nutritional treatment for acquired immunodeficiency virus-associated wasting using beta-hydroxy beta-methylbutyrate, glutamine, and arginine: a randomized, double-blind, placebo-controlled study. Clark RH, Feleke G, Din M, Yasmin T, Singh G, Khan FA, Rathmacher JA, JPEN J Parenter Enteral Nutr. 2000 May-Jun; 24(3):133-9.
[7]Baxter , Jeffrey H, 1, Mukerji , Pradip , 1, Voss , Anne C, 1, Tisdale , Michael J, 2, Wheeler , Keith B. Attenuating Protein Degradation and Enhancing Protein Synthesis in Skeletal Muscle in Stressed Animal Model Systems. Medicine & Science in Sports & Exercise. 2006;38:S550–S551.